À
UN JET DE PIERRE
À un jet de pierre
Le bonheur est
passé
Se tenant les
paupières
Comme un grand
blessé
Qui craindrait la
lumière
De ses vies
passées
Ses campagnes
guerrières
Dans une eau
glacée
Où le sage se
trempe
Comme une épée
trempée
Car qui de nous
jamais
Ne s’est trompé
À un jet de pierre
Le bonheur est
passé
Dans son habit de
nuit
De velours damassé
Aux clochettes
d’argent
De liserons, de
lierre
Dont chacune est
le sang
Dont chacune est
la chair
De ceux qu’il a
bénis
Protégés de tout
Car qui de nous
ne fut
Jamais à sa merci
Jamais à sa merci
Sa merci
Fut à sa merci
À un jet de pierre
Le bonheur est
passé
S’est penché vers
le sol
Vers la terre
tassée
A planté une fleur
Comme un girasol
De sa main sans
couleur
De sa main gantée
Voilà comme il se
donne
Voilà comme il
aime
Mais qui de nous
jamais
N’a fait de même
À un jet de pierre
Le bonheur est
passé
Nul ne l’a suivi
Ni n’a ramassé
Ce qu’il avait
écrit
Ce qu’il avait
laissé
Quelque chose de
gris
Deux lettres
enlacées
Comme deux
initiales
Peut-être d’une
autre
Probablement
peut-être
Un peu les nôtres
Un peu les nôtres
Les nôtres
Les nôtres
Dans un coin du
bar
Le bonheur est
assis
Sorte de vieillard
Comme n’importe
qui
Qui ne dit pas
merci
Pour tout ce
qu’il a bu
Tout qu’il a pris
Et qu’il n’a pas
rendu
Dans le jour qui
se lève
Dans la nuit qui
fut
Qui de nous jamais
Heureux ne fut
Heureux ne fut
Jamais heureux ne
fut
Jamais heureux ne
fut
Heureux ne fut
Jamais heureux ne
fut
Jamais heureux